Histoire et Mémoire

19 mars 2024 :

La stratégie de l’effacement, exposition aux Archives Départementales de Rennes du 15 Mars au 25 Avril.

« Ton arrière-grand-père était espagnol. Républicain, il a fait la guerre d’Espagne. »

       

 Deux phrases succinctes qui résument ce qui m’a été transmis, ce que j’ai su pendant longtemps, de la partie espagnole de ma famille. Et longtemps cela m’a suffi. Ce n’était d’ailleurs pas un sujet de discussion à la maison. La langue espagnole n’avait pas été partagée dans ma lignée. Ce pays ne transpirait pas à travers nos habitudes de vie, et peu à travers nos récits. Deux faits, qui, je le comprendrai plus tard, sont couramment présents dans les familles immigrées ayant fui la guerre. Les questions de récit, de culture, et de langue en particulier, sont dans ces cas précis, étroitement liés à des enjeux de deuil et d’intégration.

Il y a bien toujours eu ce sentiment étrange d’appartenance, commun à une grande partie des immigré·es lorsqu’on évoque ses ascendances étrangères, un peu comme un lien partagé à une terre d’origine, mais qui avait pour moi des contours diffus, un peu fantasmé, voire exotique, mais peu concret.

C’est avec la naissance de mon fils que le lien avec mon histoire et cette terre d’origine a soudainement surgi. La question de la transmission s’est alors posée à moi et un vide est apparu. Mes interrogations ont fait jaillir un pan insoupçonné de ma mémoire familiale qui s’est (re)constituée pièce par pièce, complétant par la même occasion le puzzle de mon identité propre. La  guerre, la lutte, l’exil, la déchirure, les camps, l’impossible retour.

La parole a donc été le premier jalon de la mémoire familiale. Les papiers, les photographies, traces concrètes du roman familial, le second. J’ai alors réalisé que ce récit avait toujours été là, attendant d’être mis à jour, mais dont l’essence avait été transmise sans qu’il ait été nécessaire d’avoir recours aux mots. Tous mes engagements, ma révolte et mes luttes étaient contenus dans ce récit. Ils ne venaient pas de nulle part. Ma mémoire, attendant d’être mise à jour toutes ces années, est entrée en résonance avec la mémoire collective, le récit national français, qui m’est apparu, comme ma mémoire, incomplet, partiel, flou.

Lors de la Retirada en 1939, à l’entrée sur le territoire français, les Espagnol·es ont été séparé·es, femmes et enfants d’un côté, hommes de l’autre. Le récit national fait mention de ces hommes répartis en majorité dans les camps de fortune installés à la hâte dans le Sud (plage d’Argeles, camp  du Barcarès, de St Cyprien….), mais ignore la majorité (plus de 70) des départements français qui ont mis en place des « centres d’hébergements », allant du camp à la ferme. Il ne construit pas de récit officiel sur ces faits. Rien n’a vraiment transpiré dans l’Histoire de France, ne s’est transmis. Ne restent que les camps du Sud-Ouest. Pourtant les traces (documents officiels, lettres, récits, photographies…) sont bien présentes. Je me suis alors demandée à quelle étrange stratégie de l’effacement se livre l’histoire officielle. Un demi-million de personnes sont passées par la frontière française. Elles ne peuvent pas disparaître  de l’Histoire. C’est de là qu’est né ce projet, de la nécessité de palier les manques du récit officiel, de reconstruire une mémoire collective amputée d’une partie de son histoire et de la faire perdurer. De mettre à jour et laisser des traces. Et par là même, permettre de réfléchir sur les impacts des exils forcés par la guerre, sur les mémoires (familiale et collective), sur les mécanismes de construction d’une identité, individuelle et familiale, confrontée à la violence de l’Histoire. Permettre aussi de questionner l’accueil des réfugié·es qui, encore et toujours, n’est pas à la hauteur de notre humanité.

Pour cela, j’ai choisi dix lieux d’« hébergements », répartis sur le territoire français que j’ai pris en photo en numérique, en couleur. Ces photographies sont la trace contemporaine de ce qui reste ou non de ces lieux dans le présent, souvent ignorés, souvent sans plaque commémorative, sans traces justement des événements qui se sont joués en leur sein.

En parallèle, j’ai choisi de réaliser dix portraits de famille en noir et blanc, en argentique, à la chambre photographique (Plaubel, 1955), sur lesquels se trouvent les descendant·es de familles ayant été placées dans ces lieux d’« hébergements ». Les photos de famille participent activement à l’écriture du récit familial. Elles mettent en images la temporalité de la famille et contribuent à lui donner corps. J’utilise lescodes du portrait de famille du début du 20ème siècle (d’où l’utilisation de la chambre photographique) avec une spatialisation et une hiérarchisation qui donne à voir l’histoire et la lignée familiale. J’ai laissé l’interprétation du terme « descendant·es » libre à chaque famille.

Dans chacun des portraits, des objets choisis par les familles, permettent de matérialiser leur lien avec leur histoire espagnole, avant la rupture consécutive à la guerre. Sur sept d’entre eux, des portraits photographiques de leurs descendant·es sont présents, mise en abîme du lien familial qui les relie à leurs ancêtres, et aussi affirmation de l’existence de leurs disparu·es, et de ce qu’ils ont vécu. Sur deux portraits, les protagonistes directs de 95 et 98 ans sont présent·es et arborent un objet ou une photo rappelant leur parcours et origine.

En photographiant et scénographiant ainsi la généalogie, j’attire l’attention sur l’essentiel, à savoir la temporalité de la famille et le récit qui la constitue. J’interroge aussi l’inscription des descendant·es dans leur rapport à la réalité présente par rapport au récit familial.

Des archives, constituées de lettres de réfugié·es ou rapports de l’administration sur, ou provenant, des lieux d’« hébergements » choisis, ainsi que le récit de l’histoire de chacune des familles, complètent et répondent au travail photographique, rendant tangible une réalité passée.

Reconstituer une identité familiale et une ligne temporelle qui ont été effacées comme les lieux du passé, ou déplacées comme les descendant·es, inviter à la réflexion autour des exils et migrations, réfléchir sur le délitement et l’oubli, tel est mon souhait à travers ce projet.

Lydie Turco

27 Mai 2023 :
   
Mémorial , place du  Maréchal Juin à Rennes :

Le 8 juin 1944, trente-deux résistants français et espagnols, qui étaient incarcérés dans la prison Jacques-Cartier de Rennes (Ille-et-Vilaine) et qui avaient été condamnés à mort de façon expéditive le 7 juin par le tribunal militaire allemand FK 748 de Rennes, furent conduits dans la caserne du Colombier au Champ de Mars, ancien couvent des Visitandines racheté par l’État au début du XXe siècle et transformé en caserne d’artillerie puis du génie.

Ils y furent fusillés et inhumés sur place. Les Allemands avaient initialement pris des dispositions pour qu’ils soient inhumés au cimetière de l’Est, puis redoutant que leurs tombes ne soient fleuries et ne donnent lieu à des manifestations patriotiques, ils décidèrent finalement de les enterrer dans l’enceinte même de la caserne.
Les neuf fusillés espagnols étaient des Républicains espagnols, membres de l’Union nationale espagnole (UNE) créée par le Parti communiste espagnol clandestin et qui, dans la résistance, était une branche des Francs-tireurs et partisans français-Main d’œuvre immigrée (FTP-MOI).

Quelques jours après la libération de la ville de Rennes le 4 août 1944, leurs tombes numérotées de 835 à 866 — numéros inscrits sur de petites croix blanches — furent découvertes alignées le long du mur des écuries de la caserne du Colombier.
Les corps des fusillés du Colombier ont été exhumés le 27 septembre 1944.
Les corps des neuf Républicains espagnols ont été ré-inhumés dans la nécropole nationale de Sainte-Anne d’Auray.
Ceux de Maurice Prestaut et d’Émile Le Grevellec ont été ré-inhumés dans le cimetière de l’Est de Rennes ; les autres ont été confiés aux familles et ramenés dans leurs commune d’origine.

Un mémorial a été érigé à Rennes place du maréchal Juin, à l’emplacement de la caserne du Colombier où ils ont été fusillés, caserne qui a été détruite au milieu des années 1960 dans le cadre de la restructuration du centre-ville de Rennes initié par le maire Henri Fréville.
Ce mémorial est constitué d’une stèle de marbre portant en son centre l’inscription :

« Passant souviens toi, cette stèle est dédiée aux trente-deux résistants français et espagnols fusillés en ce lieu par les nazis le 8 juin 1944 »

De part et d’autre de cette inscription centrale sont gravés trente-et-un noms :

BARRIOS-UREZ Antonio (BARRIOS-URES Antonio (FTP-MOI arrêté fin mars 1944 en Ille-et-Vilaine)
BURGOT Jean-Paul (FTPF arrêté le 8 avril 1944 à Elven, Morbihan)
CAOUREN Pierre (FTPF arrêté le 18 juillet 1944 à Poullaouen, Finistère)
CHAMPION Léon (à l’état civil LE CHAMPION Léon, FTPF arrêté le 16 mai 1944 dans le secteur de Saint-Nicolas-du-Pélen, Côtes-du-Nord, Côtes-d’Armor)
COANT Francis (FTPF arrêté le 8 mai 1944 à Scrignac, Finistère)
COANT Louis (FTPF arrêté le 8 mai 1944 à Scrignac, Finistère)
COTTE Roger (FFI arrêté le 14 avril 1944 à Pontivy, Morbihan)
DACQUAY François (FFI arrêté à Malguenac, Morbihan)
DAVID Auguste (FTPF arrêté le 4 août 1944 à Plonévez-du-Faou, Finistère)
FLORES CANO Pedro (FTP-MOI arrêté le fin mars 1944 en Ille-et-Vilaine)
FOANEN Robert (à l’état civil TOANEN Robert, FTPF arrêté le 23 août 1943 à Saint-Brieuc, Côtes-du-Nord, Côtes-d’Armor)
GARCIA RUBIO Dionisio (FTP-MOI arrêté le fin mars 1944 en Ille-et-Vilaine)
GRALL Marcel (FTPF arrêté le 23 août 1944 à Saint-Brieuc, Côtes-du-Nord, Côtes-d’Armor)
HAMON Eugène (membre du PC clandestin arrêté le 8 août 1943 à Ploufragan, Côtes-du-Nord, Côtes-d’Armor)
HERNANDEZ DIAZ Tomas, (FTP-MOI arrêté le 21 mars 1944 à Lanester, Morbihan)
HERLOAN Louis (à l’état civil KERLEAU Louis, FTPF arrêté en avril 1943)
LE BARZIC Léon (FFI arrêté le 1er avril 1944 à Elven, Morbihan)
LE BORGNE Ernest (FTPF arrêté le 3 août 1944 à Plonévez-du-Faou, Finistère)
LE BRUN Albert (FFI arrêté le 31 mars 1944 à Questembert, Morbihan)
LE CALVEZ Marcel (FTP arrêté le 3 avril 1944 à Plouguiel, Côtes-du-Nord, Côtes-d’Armor)
LE FORESTIER Roger (FTPF arrêté le 16 mai 1944 dans le secteur de Saint-Nicolas-du-Pélem, Côtes-du-Nord, Côtes-d’Armor)
LE GRÉVELLEC Émile (FFI arrêté le 31 mars 1944 à Muzillac, Morbihan)
LE PARC Léon (FTPF arrêté le 16 mai 1944 à Maël-Pestivien, Côtes-du-Nord, Côtes-d’Armor)
MALARD Gabriel (FFI arrêté le 31 mars 1944à Questembert, Morbihan)
MOIZAN Marcel (membre du PC clandestin arrêté le 6 août 1944 à Guingamp, Côtes-du-Nord, Côtes-d’Armor)
MOLINA CABRE Leoncio (FTP-MOI arrêté fin mars 1944 en Ille-et-Vilaine)
MONTORI ROMEO Lorenzo (FTP-MOI arrêté le 20 mars 1944 en Ille-et-Vilaine)
SEBASTIAN MOLINA Antonio (à l’état civil MOLERO Antonio Sebastian, (FTP-MOI arrêté fin mars 1944 en Ille-et-Vilaine)
NIETO GRANERO Ramon (FTP-MOI arrêté le 21 mars 1944 à Port-Louis, Morbihan)
PRESTAUT Maurice (responsable départemental de Libération-Nord en Ille-et-Vilaine, arrêté le 10 mai 1944 à Rennes)
SIMON Yves (FTPF arrêté le 14 mai 1944 à Carhaix, Carhaix-Plouguer, Finistère)
TURCADO ARENAS Teofilo (FTP-MOI arrêté le 23 mars 1944 en Ille-et-Vilaine)

15 Mai 2022 :

Pour la deuxième fois consécutive, le collège privé St Pierre de Port Louis a sollicité le CCER pour une intervention concernant la Guerre Civile Espagnole et ses conséquences.

Quatre membres de la commission Mémoire, Sonia, Ana, Frutos et René ont apporté leurs témoignages aux classes de 3ème.

   

L’organisation mise en place par les deux professeurs d’espagnol, Julie et Dominique, était parfaite.

Le 12 mai 2022, jour de notre venue, a été la journée de l’Espagne Républicaine. La plupart des élèves portaient un vêtement de couleur rouge, jaune ou violette.

Ils ont constitué une grande banderole républicaine dans la cour de récréation. C’est une image qui restera gravée dans nos mémoires.

Pour en revenir à nos témoignages, les collégiens ont été attentifs à nos propos. Certains, qui avaient été sensibilisés par le documentaire « El silencio de otros », nous ont posé des questions intéressantes. Nous n’avons pas pu répondre à toutes. Nous avons pris leurs questionnaires et nous nous engageons à y répondre par écrit.

Ce fut une journée très riche, pleine d’enseignements pour tous, élèves et intervenants du CCER y compris les enseignants.

La commission Mémoire a joué son rôle de passeur des valeurs républicaines. Elle a alerté aussi sur les dangers d’un éventuel retour du fascisme en Espagne. Les intervenants ont beaucoup insisté sur le besoin de vérité, et non de vengeance.
La période de terreur franquiste a durablement façonné l’Espagne.

Almudena Grandes disait que chaque Espagnol avait un sac à dos qui pesait très lourd et qu’il faudra bien, un jour, l’ouvrir pour que la vérité apparaisse.

Pour finir, nous remercions la Direction du Collège St Pierre pour son accueil chaleureux. Les familles des collégiens ont été averties de notre intervention et sont pour ainsi dire parties prenantes de la réussite de cette journée.

Encore merci à toutes et à tous.

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26 Février 2021 :

La dernière statue officielle, semble-t-il, du dictateur Franco va disparaître. L’Assemblée de Melilla a validé le retrait de la statue de Francisco Franco de la voie publique.

La statue à l’effigie du dictateur présente rue Cuesta de la Florentina dans la citadelle de Melilla La Vieja (Melilla, communauté autonome espagnole enclavée le long du littoral marocain) a été retirée. Elle avait été installée en 1978, trois ans après la mort de Franco.

Proposé par le gouvernement régional, le retrait a été soutenu par les partis Coalición por Mellila, Ciudadanos et par le PSOE. Le Partido Popular a préféré s’abstenir, et Vox s’y est opposé. Pour le gouvernement régional de Melilla, cette décision allait de soi afin « d’initier un chemin vers une pleine démocratie, car cette statue ne faisait que maintenir la ville embourbée dans le passé« .

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13 Décembre  2020 :
Retrouver l’article de Jean-Pierre COLIVET, « Des exilés Espagnols à Guingamp (1937-1939) » sur le site Patrimoine de Guingamp.
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12 novembre 2020 :

Les 7, 8 et 9 novembre, l’Association La Desbandá a organisé un Congrès International. Vous pourrez suivre ou revivre les débats et les apports de chaque participant à ce congrès, en utilisant le lien sur YouTube :

https://encuentrointernacional.ladesbanda.es/

Voici les objectifs de l’Association La Desbandá

OBJETIVO GENERAL: Participar, desde La Desbandá, en la restauración de la verdad, justicia y reparación de la memoria democrática, y en la lucha contra el auge del fascismo y la extrema derecha en Europa.

OBJETIVO ESPECÍFICO: Dar a conocer en España y en el extranjero la memoria de La Desbandá: lo que hasta ahora se ha hecho y lo que queda por hacer.

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1er septembre 2020 :
Pour toute information ou savoir où en sont les avancées dans l’exhumation des fosses communes, consultez le site en cliquant directement sur le lien ci-dessous :
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10 Mars : 2019 :

Que reste-t-il de la Transition dans l’Espagne d’aujourd’hui ?

Entre 1975 et 1978, l’Espagne est entrée dans un processus de transition de la dictature   à la démocratie qui a pu sembler, par sa rapidité et son apparente facilité – et malgré une violence inouïe – renvoyer dans un passé révolu, le régime dictatorial dont ce processus réalise la sortie, et avec lui, le fascisme des origines, le catholicisme institutionnalisé et la confiscation du pouvoir. On sait aujourd’hui qu’il n’en est rien, que cette période de l’histoire de l’Espagne est toujours bien vivante, que le passage du temps n’a rien effacé. Bien que la guerre civile d’Espagne, le régime de Franco et la transition de la dictature à la démocratie appartiennent à un passé que l’immense majorité de la population espagnole d’aujourd’hui n’a pas connu, toutes les questions que cette période – entamée en 1936 et que l’on croyait achevée en 1978 – posait alors, continuent d’alimenter des débats de toutes sortes, lui redonnant, dès lors, une certaine actualité.

Pour cela, et grâce au recul que permet le passage du temps, cette période désormais ancienne mérite d’être revisitée. Et cela est d’autant plus souhaitable que les passions ne sont pas apaisées – il semble même qu’elles se soient accentuées – et qu’au cours des quatre décennies qui se sont écoulées entre la promulgation de la Constitution, qui fait de l’Espagne un Etat authentiquement démocratique, et la période actuelle, l’alternance politique, le changement de titulaire à la tête de l’Etat, la fin du terrorisme basque, les innombrables cas de corruption, et plus récemment le resurgissement de la question catalane à un degré de conflictualité inédit, renvoient sans cesse aux temps lointains de la dictature et aux trois années au cours desquelles l’Espagne a su s’affranchir de la législation franquiste pour en promouvoir une nouvelle qui n’a rien à envier à celles des démocraties européennes plus anciennement constituées.

C’est une nouvelle lecture de la période que cette conférence se propose de réaliser sur la base d’une question première : que reste-t-il de la Transition dans l’Espagne d’aujourd’hui ? Si la tentation est grande de livrer une première et rassurante réponse : il reste de la Transition toutes les institutions créées après la mise en œuvre de la Loi sur la Réforme Politique du 4 janvier 1977 et qui a permis la constitution de la monarchie parlementaire que nous connaissons aujourd’hui, il n’en demeure pas moins que ce processus, rapide et indéniablement efficace, s’est réalisé sur la base d’une amnésie volontaire, dont on mesure aujourd’hui la dangerosité et les effets pervers. L’amnésie alors souhaitée et jugée indispensable, a agi comme un mécanisme de défense permettant de réduire autant que nécessaire les pulsions qui n’auraient pas manqué de se déchaîner, mais elle ne fut que cela et ne fut jamais synonyme d’oubli. Il y a, dans une grande partie de la population espagnole actuelle, une exigence de vérité qui passe par la remise en cause du processus de transition et de ce qu’en ont fait ceux qui ont eu à gouverner l’Espagne redevenue démocratique. La Loi sur la Mémoire Historique, qui a permis de belles avancées, en rendant possible et légale la recherche de la vérité, ne fut que la première étape de cet aggiornamento mais elle n’a pas permis de résoudre la question lancinante que se posent les victimes depuis des décennies, celle de l’impunité, celle-ci apparaissant en outre comme l’un des héritages le plus visibles de l’Espagne franquiste.

Denis RODRIGUES

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3 Mars 2019 :

 

C’est près de 200 personnes qui ont été présentes à la séance du dimanche 3 mars à l’ARVOR à Rennes. Elles faisaient suite aux 800 autres qui les ont devancées au cours des séances précédentes, sans compter les deux dernières séances à venir, voire plus. Au-delà de l’émotion, le documentaire pose clairement bon nombre de questions sur le régime franquiste et la période, jusqu’aujourd’hui, qui a suivi. Malgré les innombrables obstacles mis en place par les pouvoirs successifs en Espagne pour imposer le silence, celui-ci apparaît de plus en plus insupportable à un nombre grandissant d’Espagnol-e-s. Nous ne parlons pas seulement ici de la guerre imposée par Franco aux Républicains, mais des quarante ans qui ont suivis pendant lesquels les opposants à la dictature ont été systématiquement emprisonnés, torturés et assassinés … et même après la « Transition » pendant laquelle le vol de bébés a perduré, que nombre de responsables franquistes et de tortionnaires ont pu continuer leurs sinistres activités ou vivre en toute impunité. Nous avons rappelé notre réprobation de voir la sinistre figure de Franco et le drapeau de la royauté héritière figurant en bonne place sur l’affiche en langue française (l’Arvor n’y est pour rien). Une affiche plus conforme au contenu a été ultérieurement mise en avant.  La salle a remarqué une grande absente de ce documentaire : l’Église catholique espagnole qui a sans relâche appuyé le dictateur. Seuls les réalisateurs pourraient nous donner une réponse à cette absence incompréhensible. De jeunes Espagnoles, présentes dans la salle ont fait état de leur ignorance passée de ces questions brûlantes. C’est un fait, 40 ans de dictature suivies d’une longue période pendant laquelle les pouvoirs successifs se sont efforcés de passer sous silence les effroyables activités de la dictature franquiste, ont créé plusieurs générations inconscientes de ce qui s’était passé et de ce qu’il se passait il n’y a pas si longtemps. La reconnaissance du droit à la justice des victimes avance lentement, et il faudra continuer à soutenir ceux et celles qui la demandent, même s’il faut attendre que les poules aient des dents ou plus littéralement en espagnol que les grenouilles aient des poils comme le disait Maria Martin, l’une de celles, qui  a attendu toute sa vie pour que justice lui soit rendue.

Gérard HAMON

Mas de 200 personas asistieron a la sesión del domingo 3 de marzo del 2019 en el cine Arvor de Rennes.
A estos espectadores se suman los 800 de las sesiones anteriores sin contar con los venideros.
Mas alla de la emoción este documental plantea numerosas preguntas sobre el régimen de Franco  y  su época hasta hoy.

A pesar de los numerosos obstáculos puestos por los distintos gobiernos que se sucedieron en el poder con el afán de imponer un silencio, esta situacion se hace cada vez mas insoportable a un nùmero creciente de Españoles y Españolas.  No  sólo  se trata de la guerra impuesta por Franco a los Republicanos pero de los 40 años siguientes cuando se siguió encarcelando, torturando y asesinando a los opositores politicos de manera sistemática, incluso durante la Transición cuando se continuó el robo de los bebés y que los responsables franquistas, los torturadores siguieron sus actividades con toda impunidad.
Al ver el cartel francés de la película con la cara desagradable de Franco junto a la bandera de la monarquía, su heredera, dimos a conocer nuestra reprobación y mas tarde hicimos un cartel mas conforme al contenido de la pelicula (el Arvor no tiene ninguna responsabilidad).
Todos los presentes  observaron una gran ausente en el documental, la Iglesia que no paró de apoyar  al dictador. Los únicos que podrían darnos unas explicaciones son los realizadores. Jóvenes Españoles entre los presentes hicieron constar su ignorancia del pasado acerca de de aquellas preguntas tan delicadas.

Es un hecho real, 40 años de dictadura mas un periodo cuando los distintos gobiernos callaron las horrendas actividades del franquismo criaron a muchas generaciones de jóvenes Españoles ignorantes de lo que pasó, de lo que pasaba en unos tiempos no tan lejanos.

El reconocimiento del derecho a la justicia para las victimas va lento. Hay que seguir apoyando a los que piden justicia aunque se tenga que esperar a que las ranas críen pelo como suelen decir los que han esperado toda su vida asi como Maria Martin.

Gérard HAMON, Traduction Michèle Martinez

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Janvier 2019 :
Dans les buts du Centre Culturel Espagnol de Rennes figurant à l’article 2 de ses statuts, il est
indiqué :
« L’association Centre Culturel Espagnol a pour buts de :
Promouvoir et développer la connaissance de l’Espagne sous toutes ses formes :
linguistique, culturelle, sociale, économique, historique dont la mémoire des républicains
espagnols ».
C’est donc dans ce cadre que se fonde début 2019 la commission Mémoire de la République
espagnole. Elle ne part pas de rien, une commission Mémoire l’a précédée. La République
espagnole fait partie de l’ADN de notre association, la promotion et le développement de sa
connaissance se sont inscrits dès ses premières activités en 1997 (prenant la suite du Cercle
espagnol de Rennes). Pour affirmer cette position, le drapeau de la République espagnole figure
en bonne place dans nos locaux et durant notre assemblée générale. Il figure aussi sur notre site
Plusieurs moments forts ont rythmé la réalisation de cet objectif. Pour ne citer que les plus
saillants, ce sont : le soutien à la publication et la diffusion de « La mémoire retrouvée des
Républicains espagnols » de Gabrielle Garcia et Isabelle Matas (369 pages, Rennes, Editions
Ouest France, 2005), le soutien et la participation à l’exposition itinérante « De Rennes à Saint
Malo les Républicains espagnols en Ille et Vilaine », les débats et conférences des 7 et 8 juin
2012 « La République, la guerre d’Espagne, la dictature franquiste », l’organisation le 2
février 2017 de la conférence-débat « L’Espagne sous le régime de Franco » autour du livre
du même nom de Denis Rodrigues.
Nous nous proposons, entre autres, de mettre en ligne sur notre site tous les documents anciens relatifs à cette activité. Le Centre Culturel Espagnol est aussi présent chaque année avec le Coro à la commémoration du combat des résistants républicains espagnols et des résistants français fusillés au Colombier en 1944. Il est aussi présent le 30 décembre de chaque année au site commémoratif des fusillés de la Maltière. Deux
cérémonies au cours desquelles le drapeau républicain espagnol figure auprès des drapeaux
officiels français. Au grand dam des fascistes et de leurs émules, le drapeau de la République
espagnole flotte encore. Cette commission se met donc au travail en projetant des moments
forts, mais aussi un suivi régulier et une information sur l’actualité de la République espagnole.
Gérard HAMON
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Dimanche 27 mai 2018, 16h00 :

Comme chaque année, El Coro s’est rendu à la Stèle des fusillés, Place du Maréchal Juin, pour chanter  lors de la cérémonie du souvenir à la mémoire des 32 fusillés du Colombier le 8 juin 1944.
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Février 2017 :